le covid-19 chez les enfants : NOTRE veille scientifique

Sommaire

Lettre ouverte à M. Blanquer suite à la sorte du nouveau protocole scolaire

Les enfants s’infectent, comme les adultes et les adolescents

Dans un premier temps, des doutes existaient sur cette question, principalement à cause de la prévalence des formes bénignes et asymptomatiques et du manque d’études scientifiques.

Cette question ne soulève désormais plus aucun débat : il n’existe plus de doutes scientifiques sur le fait que les enfants puissent être contaminés par le SARS-CoV-2 et développer la COVID-19.

De plus, il a été démontré récemment que les enfants et les adultes sont également susceptibles d’être infectés. La probabilité d’infection chez les jeunes enfants est la même que pour les adultes ou les adolescents, comme rapporté par une  étude sur les anticorps parue début Novembre et confirmé par une autre qui montre aussi que les enfants restent largement asymptomatiques une fois infectés.

On peut rappeler cependant que les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies américains (CDC) reconnaît désormais que les porteurs infectés asymptomatiques ou présymptomatiques,  (qui se sentent bien et peuvent ne pas être conscients de leur caractère infectieux pour les autres) sont responsables de plus de 50% des transmissions.

Une étude qui vient d’apparaître confirme que le risque de transmission asymptomatique est important dans les groupes d’âge plus jeunes.

On note également une importante étude du ministère de la Santé Israelien selon laquelle les enfants sont plus susceptibles d’être contaminés par le coronavirus que les adultes et peuvent le transmettre à d’autres : 8% de 678 000 tests COVID-19 effectués sur des enfants de moins de 17 ans entre le 27 janvier et le 24 septembre sont revenus positifs, selon l’étude. Ce taux est supérieur de 2 % à celui des quelque 2,6 millions de tests effectués sur des adultes au cours de la même période.

Les tests sérologiques, qui recherchent des anticorps pour déterminer si une personne a déjà eu le virus, ont été encore plus rigoureux, montrant un taux de 7,1 % de positifs chez les enfants, contre 1,7 %-4,8 % chez les adultes entre le 28 juin et le 14 septembre. Des “super-propagateurs” ont été identifiés: dans 17 cas suivis par le ministère de la Santé, les enfants ont réussi à infecter plus de 10 de leurs pairs.

Une étude de séroprévalence, débutée au printemps et réalisée par les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) et l’Université de Genève (UNIGE), révèle que le taux de séroprévalence chez les enfants âgés de plus de 6 ans (23%) est quasiment identique à celui de la population générale. Ce taux diffère grandement des résultats obtenus à la fin de la première vague et s’explique probablement par le fait que les écoles sont restées ouvertes durant la deuxième vague.

Une étude en cours en Angleterre montre aussi que désormais les enfants sont la tranche d’âge avec l’incidence la plus élevée. Ces données pourraient aussi être due à l’émergence d’une nouvelle variante, connue sous le nom de “variante anglaise” ou VUI-202012/01.

Les épidémiologistes britanniques ont conclu que les enfants d’âge primaire ont plus de 2 fois plus de chance qu’un adulte d’être le cas “index” du foyer, cette probabilité s’élève à 7 fois plus pour les adolescents.  L’étude ComCor de l’Institut Pasteur indique également que le fait d’avoir des enfants scolarisés augmente le risque des familles d’être contaminées.

Une étude (pre-prints) en Autriche sur 250 écoles, a montré qu’il n’y aucune différence à l’école en termes de contamination entre les groupes d’âge, les sexes, les élèves par rapport aux enseignants, ou les écoles primaires par rapport aux écoles secondaires.

Une étude (pre-prints) en Autriche sur 250 écoles, a montré qu’il n’y aucune différence à l’école en termes de contamination entre les groupes d’âge, les sexes, les élèves par rapport aux enseignants, ou les écoles primaires par rapport aux écoles secondaires.

Une étude dans des écoles en Bavière, a montré que les enfants étaient 6 fois plus infectés qu’attendu, et qu’il n’y avait pas de différences d’âge.

Il est important de remarquer que l’incidence chez les enfants est sûrement largement sous-estimée, d’une part à cause de la forte occurrence des formes asymptomatiques, qui ne déclenchent pas donc un dépistage, et d’autre part à cause de la probabilité accrue de faux négatifs chez les enfants. En effet, la qualité du prélèvement nasal a des conséquences sur l’analyse PCR, or cet acte peut s’avérer plus difficile chez un enfant. D’autre part, la probabilité des faux négatifs augmente avec en cas de dépistage trop précoce ou trop tardif, ce qui peut être le cas notamment lorsque un enfant porteur asymptomatique est testé uniquement après qu’il ait infecté un membre du foyer à son tour développant une forme symptomatique. Une étude récente a montré que les enfants peuvent être positifs au dépistage pour un délai bien plus court que les adultes.

Conséquences Enfants

Les enfants lorsqu’ils s’infectent font moins de formes graves, toutefois le nombre de cas nécessitant une hospitalisation ou des soins intensifs augmente avec le taux d’incidence. Des graves inflammations multi systémiques peuvent apparaître chez les enfants suite à une infection à SARS-CoV-2, ainsi que des sérieux problèmes cardiaques ou des pancréatites.

Un article récent analyse les résultats d’études au Brésil et en Espagne sur plus de 5000 enfants. La mortalité a été 10 fois plus élevées chez les enfants de 11–17 years avec COVID-19 que chez des patients du même groupe avec la grippe (5 décès [1·1%] sur 458 dans le premier cas contre 1 [0·1%] dans le deuxième). Clairement, COVID-19 ce n’est pas une infection “anodine” chez les enfants et adolescents.

En outre, un nombre croissant d’enfants présentant des symptômes de longue durée est rapporté par les parents et les médecins. Une étude confirmant que les enfants peuvent avoir le même type de symptômes persistants que les adultes vient de paraître. En France, à ce jour aucune étude n’est disponible. Le Professeur Eric Guedj (Assistance publique – Hôpitaux de Marseille, APHM) a déclaré que six cas pédiatriques ayant le même profil que des adultes, avaient dû être exclus, pour des raisons de méthodologie, d’une étude sur les symptômes persistants et le métabolisme cérébral dans le Covid long, réalisée en collaboration IHU et APHM. Cette étude met en évidence un lien entre les plaintes fonctionnelles et des altérations cérébrales, notamment pour les patients les plus jeunes, qui ont plus de symptômes.

A ce jour, les séquelles à long terme ou les risques pour les enfants de développer des maladies chroniques ne sont pas connus.

Contagiosité des Enfants

Un article de Science Avenir reporte clairement l’état de connaissances à fin Octobre: “Malgré quelques rapports encourageants lors de la première vague (avec celui-ci et celui-là), les dernières études suggèrent une contagiosité tout aussi élevée que les adultes (voire plus importante). À Chicago (États-Unis), une étude sur 145 malades conclut que les adolescents ont une charge virale comparable à celle des adultes (donc seraient aussi contagieux), alors que les moins de 5 ans auraient 10 à 100 fois plus de charges virales que les adultes. En Italie (dans la ville de Trento), les malades de moins de 15 ans avaient une plus grande probabilité de contaminer d’autres personnes que les adultes (étude pas encore revue par les pairs). En Corée du Sud, une étude de contact tracing sur plus de 60.000 personnes (publiée le 10 octobre) montre que les mineurs avaient la même probabilité que les adultes de transmettre la maladie à l’extérieur de la maison, mais dans la maison, les enfants de plus de 10 ans étaient plus contagieux que les adultes. Finalement, la plus grande étude de « contact tracing » à ce jour (publiée dans Science le 30 septembre), menée en Inde avec plus de 650.000 personnes, montre que les enfants de moins de 17 ans infectaient les autres personnes tout autant que les adultes : ils représentaient 8 % du total des cas, contaminant 10 % des cas contacts (pour comparer, les 18-29 ans étaient 23 % des cas et ont contaminé 23 % des cas contacts, donc un rapport de 1-1 pour les pourcentages d’infection, similaire aux enfants).”

En complément, des preuves de la contamination intra-enfants, et notamment en milieu scolaire, ne cessent pas d’accroître.

L’étude d’un cluster associé à un lycée en Israël a révélé que plus de 260 personnes ont été infectées, dont 153 étudiants (taux d’attaque: 13,2%) et 25 membres du personnel (RA: 16,6%), en démontrant ainsi le potentiel de transmission de masse en milieu scolaire.

Un autre cluster # COVID19 dans une école K12 (de la maternelle à la 12e année) au Chili a été reporté, avec le virus se propageant rapidement dans la communauté scolaire après avoir été introduit.

Une étude non encore validée par les pairs indique aussi un nombre important de contaminations dans les établissements scolaires en Italie et suggère que des tests rapides et l’isolement des camarades de classe pourraient probablement réduire le risque de transmission en milieu scolaire.

Un rapport d’un cluster # COVID19 commençant par une réunion de famille et affectant par la suite 41 personnes dans 9 familles différentes et 8 lieux de travail différents a été aussi publié: Il convient de noter la transmission d’un enfant de 9 ans aux grands-parents et par la suite à un voisin âgé.

La presse relaie aussi sans cesse des clusters en milieu scolaire : Au Canada, un de plus grands foyers de transmission en milieu scolaire jusqu’à présent concerne une école élémentaire, où 88 cas ont été recensés: 28 cas parmi les membres du personnel et 50 parmi les élèves, dont 27 qui ont été identifiés à la suite d’une grande opération de dépistage.

En Allemagne, un cluster dans une école primaire de Mügeln, a été reporté, avec 63 élèves et enseignants (sur un total de 130) testés positifs. Un autre dans une école primaire a compté plus d’un enfant sur quatre positifs et 19 élèves avec 2 personnels.

En Belgique, 17 des 26 élèves d’une sixième année d’une école de Deinze ont été infectés par le coronavirus, en 10 jours.

En France il existe aussi des exemples de clusters dans les écoles des petites de province de faible densité qui ont initié des chaînes de contamination se terminant dans des Ephad via le personnel. À Blainville-sur-Orne, près de Caen (Normandie), le dépistage massif de la population mis en place depuis le jeudi 3 décembre 2020, suite à des cas apparus dans une école primaire, fait apparaître 19 neuf cas positifs, dont 13 enfants de l’école primaire Colbert. 9 font partie d’une même classe élémentaire CE2-CM1, désormais fermée. 

D’ailleurs, depuis le déconfinement du 11 Mai, plus de 340 000 enfants et adolescents ont été contaminés, dont plus de 90% depuis la rentrée de Septembre. Fin décembre, la tendance à la hausse des admissions en réanimation de 10-19 ans, ne s’est toujours pas inversée, contrairement à celles de toutes les autres tranches d’âge.

Ces chiffres, largement sous-estimés pour une population très souvent asymptomatique (d’après le Conseil Scientifiques environ 70% des enfants infectés n’auraient pas de symptômes), ne sont pas surprenants. La contre-tendance des enfants et adolescents en décrue épidémique a même déjà été observée dans d’autres pays comme l’Angleterre.

La confirmation que l’école est un lieu d’infection vient des séquençages du génome reporté par une étude faite sur un cluster dans une école de Hambourg : une seule personne est à l’origine de 40 autres contaminations. 

Une très large étude comparant les 6.000 décisions prises dans 79 pays pour comprendre quelles sont les mesures les plus efficaces pour freiner l’épidémie, a mis en évidence comme ce qui a fonctionné le mieux c’est l’interdiction des petits rassemblements familiaux ou festifs et la fermeture des établissements scolaires, notamment les lycées et les universités. 

Une autre étude récente a montré que la fermeture de tous les établissements d’enseignement est une de trois mesures principales pour reduire considérablement la transmission

Tout récemment, le CDC américain vient de modifier ses recommandations pour la scolarisation en présentiel et déclare maintenant que “les preuves de plus en plus nombreuses selon lesquelles les enfants de tous âges sont sensibles à l’infection par le SRAS-CoV-2 et, contrairement aux premiers rapports, pourraient jouer un rôle dans la transmission”. Il répertorie également l’apprentissage en personne comme un risque élevé.

Les scientifiques du monde entier alertent sur les nouvelles conclusions sur la contagiosité des enfants et le rôle de l’École dans la propagation épidémique, un article très récent admet que “le rôle que jouent les enfants, et par conséquent les écoles, dans la pandémie covid-19 a été difficile à résoudre, mais ce casse-tête commence enfin à être résolu”. “Les dernières recherches montrent que les infections chez les enfants passent souvent inaperçues et que les enfants sont tout aussi sensibles que les adultes à l’infection. Les enfants transmettent probablement le virus à un rythme similaire à celui des adultes. Bien que les enfants soient heureusement beaucoup moins susceptibles que les adultes de tomber gravement malades, il n’en va pas de même pour les adultes qui s’occupent d’eux. Les données suggèrent que les écoles ont été le moteur de la deuxième vague en Europe et ailleurs. Cela signifie que la sécurité des écoles doit être repensée d’urgence”.

Covid-19 et Milieu scolaire : mesures de prévention

Le Dr Michael Ryan, Directeur exécutif chargé du Programme OMS de gestion des situations d’urgence sanitaire, a répondu clairement à la question si les écoles étaient sûres. La réponse dépend de l’existence ou non d’une transmission communautaire. C’est le problème fondamental qui doit être abordé en premier, avant que les écoles puissent rouvrir. Il dit clairement : “Si nous supprimons le virus dans notre société, dans nos communautés, nos écoles pourront ouvrir en toute sécurité.” Une fois que le vrai problème de la transmission communautaire a été résolu, des changements doivent être apportés à l’environnement scolaire. Cela inclut l’utilisation des masques et protection faciales, visières, des mesures de distanciation et aération. 

Les mesures visant à réduire les risques de contamination par aérosol sont les plus importantes. Pour rappel, cette voie de contamination, dont le caractère dominant avait été identifié avant l’été, a été désormais reconnue par l’OMS et le CDC américain, qui rappelle qu’elle est la “voie principale de transmission du SRAS-CoV-2 : L’infection par le SRAS-CoV-2 est principalement transmise par des gouttelettes respiratoires générées lorsque les gens toussent, éternuent, chantent, parlent ou respirent”.

Une étude récente montre également que la contamination par voie aérosol semble corréler avec une pathologie respiratoire plus sévère.

Variante anglaise B117

Une étude en cours en Angleterre montrait fin décembre que désormais les enfants sont la tranche d’âge avec l’incidence la plus élevée. Ces données pourraient aussi être corrélées à l’émergence à la même période d’une nouvelle variante, connue sous le nom de “variante anglaise” ou VUI-202012/01.

Selon les données du gouvernement anglais, cette variante est au moins 50% plus contagieuse et la principale différence réside dans le taux d’infection chez les enfants jusqu’à l’âge de 9 ans. Aucune différence significative n’a encore été trouvée dans l’évolution clinique, la mortalité dans les 28 jours ou le risque de réinfection. Toutefois, une telle augmentation de transmission qui suit une croissance exponentielle va finir pour avoir le même ou plus d’effet que si la contagiosité restait inchangée mais la gravité augmentait. D’ailleurs, la situation sanitaire en Angleterre, et notamment dans la zone d’émergence de la variante, est proche du collapse; le nombre d’enfants hospitalisés a augmenté énormément sur le mois de décembre et les écoles resteront fermées pour probablement longtemps.

La France est un des rares pays en Europe à avoir repris les vols d’Angleterre pour tous les citoyens européens, alors que les autres pays les ont repris seulement pour les ressortissants, sans instaurer une quarantaine. Cette liberté de circulation, associée au retard français dans le séquençage du virus, font craindre que la variante VUI-202012/01, déjà détectée dans le pays, se propage rapidement et puisse constituer un danger accru pour les enfants.

Conclusion : Une forte incertitude est liée aux effets sur les enfants de la nouvelle variante identifiée en décembre. Une circulation encore plus fréquente chez les enfants déterminerait une hausse considérable des cas graves et des formes invalidantes.